Introduction

La ville de Rennes a déterminé initialement trois objectifs au déploiement de la vidéo protection
dans l’espace public : l’aide à l’élucidation des enquêtes judiciaires, la prévention des actes de
délinquance et la lutte contre le sentiment d’insécurité.
L’impact du dispositif sur l’élucidation des enquêtes judiciaires est peu documenté jusqu’à ce jour
en France. Des études montrent toutefois qu’il est faible au regard des investissements consentis
par les collectivités publiques. Des éléments de réflexion sur ce sujet seront à trouver en
mobilisant les données rendues disponibles par la Police nationale (PN) ou collectées par la
Police municipale (PM) à Rennes. De même pour appréhender l’impact de la vidéo protection sur
la prévention de la délinquance.
Les indicateurs quantitatifs liés à l’efficacité de la vidéo protection n’apportent que des réponses
partielles et imparfaites. L'évaluateur a réalisé une série d’entretiens et d’observations sur le
terrain. Une première phase de ce travail a été réalisée en 2015 à la fin de l’été (semaine du 24
août), une seconde à l’automne (semaine du 5 octobre) puis une troisième au printemps 2016
(semaine du 23 mai). Trois périodes distinctes qui ont permis d’appréhender le dispositif et son
usage à des moments et dans des contextes différents. Durant la période estivale, les effectifs de
la PM sont incomplets et la population jeune (lycéens et étudiants) est peu active. À l’automne, la
PM a réuni ses effectifs, l’amplitude des horaires de travail des opérateurs est étendue et les
populations susceptibles d’occuper l’espace public sont bien présentes dans la ville. Au
printemps, cette année, l’espace urbain a été investi durant plusieurs semaines par des
manifestants opposés au projet de loi Travail ; en marge des cortèges syndicaux, les violences
contre les agents de l’ordre et les dégradations de biens se sont répétées et multipliées dans le
centre-ville.
L’approche ethnographique retenue vise à analyser et à comprendre les pratiques concrètes des
opérateurs. Comme l’a souligné avec justesse Tanguy Le Goff, « leur invisibilité est inversement
proportionnelle à la visibilité de la vidéosurveillance dans l’espace public ». Pourtant leur rôle est
déterminant puisqu’ils sont au cœur d’une organisation qui doit, chaque jour et avec la même
intensité, assurer tout à la fois la surveillance générale d’un territoire, rassurer la population et
détecter des comportements déviants. L’activité de ces professionnels qui officient derrière les
moniteurs est rarement étudiée. Les travaux publiés sur ce sujet sont peu nombreux. On s’en fera
néanmoins l’écho dans le rapport pour éclairer l’activité des opérateurs en poste dans le CSU de
la ville de Rennes.
Ce travail d’observation a été enrichi par une série d’entretiens avec, d’une part, les agents
présents dans le centre de supervision ou en patrouille sur le terrain et des acteurs de la sécurité
publique (police nationale et transports publics), d’autre part des personnes en errance sur la voie
publique dont le regroupement avec des chiens peut occasionner des troubles à la tranquillité
publique. Ces personnes étant régulièrement visées par les opérateurs, on a considéré qu’il était
utile de les interroger pour savoir dans quelle mesure la présence de caméras avait modifié leur
façon d’occuper l’espace public.

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